Il flotte dans l’air une conviction tenace : certaines matières, enseignées dans les plus prestigieuses écoles privées, seraient la clé vers des métiers à plus de 7000 euros par mois. Cette idée, qu’on entend parfois au détour d’une conversation ou sur les forums d’orientation, suscite fascination et méfiance. Elle soulève aussi une question légitime : existe-t-il réellement une filière élitiste, inaccessible en dehors du privé, qui garantit une telle rémunération ?
Une promesse vendue au prix fort
Derrière les murs des écoles de commerce, d’ingénieurs ou de design numérique privées, l’offre éducative est souvent présentée comme un tremplin vers l’élite professionnelle. Le discours est séduisant, porté par des plaquettes soignées et des témoignages d’anciens élèves. Les établissements affichent sans détour leurs chiffres d’insertion rapide, en omettant parfois de préciser les variables : secteur d’activité, pays, taille de l’entreprise, ou encore expérience préalable.
Mathilde, 28 ans, issue d’une école de commerce privée à Paris, m’a confié l’écart entre les attentes et la réalité :
« Même si certains de mes camarades ont décroché des postes à 7 000 ou 8 000 euros, c’est très loin d’être la majorité. À la sortie d’école, je gagnais 2 900 euros brut. C’est seulement après quatre ans de conseil que j’ai atteint 6 500 euros. Et encore… en bossant près de 60 heures par semaine. »

Des matières très spécifiques, mais pas exclusives
Le privé s’est indéniablement positionné sur des créneaux peu occupés par l’univers public. Selon la Fondation pour l’innovation politique (Fondapol), certaines spécialités comme la kinésithérapie, l’ostéopathie, le design numérique ou l’architecture intérieure sont largement dominées par des établissements privés. Des écoles telles que LISAA, Penninghen ou l’ISCPA proposent des formations exclusives, souvent chères, qui répondent à une demande croissante dans le marché du digital ou du bien-être.
Mais ces formations spécifiques évoquent rarement les salaires très élevés. Les revenus dépendent d’une multitude de facteurs : localisation du poste, type d’employeur, expériences complémentaires ou encore réseau professionnel. Quant aux écoles d’ingénieurs ou de commerce privées, souvent citées en exemple pour leurs débouchés lucratifs, elles ne sont pas fondamentalement différentes de leurs homologues publiques sur le plan des contenus pédagogiques.
Le poids du diplôme et la réalité salariale
Plus que la matière enseignée, c’est la reconnaissance du diplôme qui fait la différence. Un master d’ingénieur ou de management délivré par une école accréditée (CTI, AACSB, AMBA) élargit les perspectives, mais ne fournit aucune garantie. D’après les données de l’enseignement supérieur français, de nombreuses écoles privées délivrent des diplômes validés par l’État, au même titre que certaines écoles publiques.
Voici une estimation des salaires selon les domaines, basée sur plusieurs enquêtes disponibles (APEC, INSEE) :
Domaine | Salaire moyen à l’embauche | Salaire possible après 8-10 ans |
---|---|---|
Ingénierie informatique | 3 500 €/mois | 7 000 à 9 500 €/mois (expert/CTO) |
Finance (M&A, conseil stratégique) | 4 200 €/mois | 8 000 à 12 000 €/mois |
Kinésithérapie | 2 600 €/mois | 4 500-6 000 €/mois (cabinet privé) |
Design numérique | 2 800 €/mois | 5 000 €/mois (poste senior) |
Pas d’exclusivité, mais des barrières financières
Contrairement à l’idée reçue, aucune matière n’est strictement réservée aux écoles privées. Même la kinésithérapie est accessible via des instituts publics (IFMK), avec des concours très sélectifs et peu de places. Quant au numérique ou au design, l’enseignement public propose également des formations reconnues, notamment dans les universités techniques ou les écoles d’art publiques telles que l’ENSCI ou les Beaux-Arts.
Le différentiel tient surtout dans les moyens financiers : les frais de scolarité dans les écoles d’ingénieurs peuvent aller de 3 000 à plus de 10 000 euros par an selon AEF Info. Ce coût limite de fait l’accès à certaines formations, bien plus que leur contenu pédagogique.

Le mythe du 7 000 euros par mois
La croyance en une matière miracle enseignée exclusivement dans des grandes écoles privées tient davantage de la construction marketing que de la réalité statistique. Les métiers à très haute rémunération (consulting, finance, tech de pointe) sont peu nombreux, très concurrentiels, et les profils recrutés doivent davantage leur succès à la performance personnelle qu’à l’école fréquentée.
Quels sont les métiers les plus rémunérateurs après une formation dans une grande école privée ?
Les fonctions en finance (banque d’affaires, private equity), en conseil stratégique ou dans la tech (devops, data, IA) offrent les plus hauts salaires, surtout dans des grands groupes internationaux. Les hautes responsabilités (direction générale, CTO, CFO) permettent de dépasser les 7 000 €/mois, mais ne concernent qu’une minorité de diplômés.
Quelles sont les différences entre les écoles privées et publiques en termes de reconnaissance des diplômes ?
La reconnaissance dépend du statut de l’établissement et de l’accréditation obtenue (Grade Master, CTI, AMBA). Certaines écoles privées sont habilitées par l’État au même titre que les écoles publiques.
Comment les écoles privées justifient-elles les frais de scolarité élevés ?
Elles invoquent souvent la qualité des infrastructures, l’accompagnement personnalisé, les partenariats internationaux et un réseau professionnel dense. Ces avantages sont réels, mais ne suffisent pas toujours à combler l’écart financier pour tous les étudiants.
Quels sont les avantages et inconvénients des classes préparatoires aux grandes écoles ?
Les classes prépa offrent une formation académique exigeante et gratuite dans le public. Elles mènent ensuite aux grandes écoles (publiques ou privées). En contrepartie, leur rythme est très soutenu et reste sélectif à l’entrée.
Quelles sont les options de financement disponibles pour les étudiants dans les écoles privées ?
Bourses sur critères sociaux, prêts étudiants garantis par l’État, aides de fondations ou d’entreprises partenaires. Certaines écoles proposent aussi des dispositifs d’alternance pour alléger le coût global de la formation.