500 milliards de barils sous leurs pieds : ce pays voisin capte l’attention des industriels pendant que la France regarde ailleurs

Mathias Debroize
Mathias Debroize
Master 2 en finance, régulateur des marchés financiers
Dans la région, des forages discrets et des accords techniques éveillent des soupçons. Un pays attire désormais les convoitises énergétiques.

Depuis quelques semaines, je suis sur la piste d’informations énigmatiques circulant dans les milieux industriels pétroliers. Ce qui relevait au départ du simple bruit de couloir a fini par converger vers un pays bien réel, à quelques heures de vol de Paris : le Maroc. Dans l’ombre de l’agitation européenne, il se passe peut-être quelque chose de bien plus stratégique qu’il n’y paraît.

Découverte colossale au large du Maroc : une manne qui relance toutes les projections

En août 2024, j’ai appris qu’un consortium emmené par Energean, la britannique Chariot et l’Office National des Hydrocarbures et des Mines (ONHYM) a repris les travaux de forage du puits Anchois-3, situé au large de Larache sur le permis gazier Lixus. Un forage qui passe quasi inaperçu dans les radars médiatiques européens… sauf que plusieurs sources concordantes pointent une estimation officieuse de 500 milliards de barils de pétrole potentiels au large de cette zone, bien au-delà des attentes initiales centrées sur le gaz.

J’ai contacté un ingénieur ayant travaillé sur le projet Anchois en 2022. Sous couvert d’anonymat, il m’écrit :

« Les technologies de résonance sismique utilisées ces derniers mois vont plus loin que ce qui est rendu public. Il y a eu plusieurs signaux très profonds laissant penser à une structure géologique massive en hydrocarbures liquides, bien plus dense que le gaz repéré dans les puits précédents. Les industriels n’osent pas encore parler de pétrole, mais les chiffres que j’ai vus en interne dépassaient de loin les gisements du Golfe de Guinée. »

Un basculement industriel sous silence

La lecture des récents rapports trimestriels d’Energean et de Chariot montre en effet une prudence inhabituelle. À la page 11 du rapport Energean H1 2024, aucune mention directe de pétrole, mais une hausse imprévue des investissements en traitement de données sismiques et une extension logistique vers le large. Cela ne colle pas aux besoins typiques d’un projet gazier. Le Maroc ne confirme rien officiellement, mais les infos fuitent.

Pourquoi ce silence en Europe ?

Alors que l’Antarctique fait les gros titres avec ses 500 milliards de barils supposés enfouis sous ses glaces, le cas du Maroc n’intéresse guère les autorités françaises ni la presse spécialisée. Et pourtant :

  • Des accords bilatéraux énergétiques ont été renforcés entre Rabat et Londres en mars 2024.
  • Les réserves mondiales sont estimées à 1 732 milliards de barils, soit environ 52 ans de production à rythme constant (Connaissance des Énergies).
  • Le Maroc est géographiquement stratégique, à mi-chemin entre l’Afrique de l’Ouest, très explorée, et l’Europe en déclin pétrolier.

Dans ce contexte, la France semble se désintéresser d’une opportunité majeure à ses portes, contrairement à d’autres puissances industrielles qui envoient discrètement leurs représentants.

Un vieux rêve refait surface : indépendance énergétique

Pour comprendre la portée géopolitique de cette affaire, j’ai échangé avec un diplomate basé à Rabat depuis plus de dix ans, connaissant très bien les réformes énergétiques marocaines :

« Si les estimations internes sont vraies, alors nous ne sommes pas face à un simple gisement. C’est un levier de négociation. Imaginez ce que cela signifie pour un pays qui importe 90% de son énergie. C’est comme si on venait de lui tendre les clés d’une diplomatie nouvelle. »

Le Maroc, souvent présenté comme modèle pour sa stratégie solaire et éolienne, pourrait ainsi devenir un acteur incontournable du pétrole conventionnel sans même l’avoir cherché. C’est cette contradiction qui fascine les stratèges et met Paris hors-jeu, jusqu’à présent.

La France à contre-temps ?

Le contraste est saisissant. En Europe, aucun nouveau grand projet d’exploration pétrolière n’est annoncé pour 2024, d’après le Global Oil & Gas Extraction Tracker (GEM). Même la Grèce, dans le contexte tendu de la mer Égée, se tourne vers le stockage de carbone. Nous assistons à un repli. Pourtant, près de nos côtes sud, un champ pétrolier pourrait changer la donne.

Voici quelques chiffres clés pour situer l’impact potentiel :

Indicateur Valeur
Réserves pétrolières mondiales (2024, estimation) 1 732 milliards de barils
Consommation globale (2024) 104 millions barils/jour
Production mondiale annuelle (2022) 34 milliards de barils
Potentiel estimé zone Anchois élargie 500 milliards de barils (non officiel)

Le gisement qui dérange

Rien n’est confirmé, aucune alarme officielle n’a été déclenchée. Et c’est justement cela qui rend cette affaire digne d’intérêt journalistique. À défaut de faire la une, le Maroc avance ses pions. L’absence d’annonces sert d’écran de fumée. Or, tous les précédents l’ont montré : plus une découverte reste secrète, plus elle a le potentiel de bouleverser les équilibres.

Peut-on sérieusement laisser ce signal sans prise de position ? Dans un climat de tensions énergétiques planétaires, où même l’Antarctique est scruté, l’inaction de la France interroge. Ne pas être présent, c’est déjà perdre du terrain.

Vers une relocalisation énergétique… à nos portes ?

L’idée qu’un pays voisin peu médiatisé sur l’échiquier pétrolier puisse receler les plus grandes réserves de pétrole nouvelles depuis des décennies, voilà de quoi alimenter les débats industriels, économiques, et climatiques. Faut-il encourager cette approche régionale ? Ou faut-il redoubler d’efforts vers la transition ?

Les entreprises sont prêtes. Les gouvernements hésitent. Et le public… reste à informer. C’est là que mon travail prend sens. Ce sujet, je vais continuer à le suivre. Il mérite de sortir de l’ombre.

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