Potasse en profondeur sous des serres, arrêtés en cascade et indemnisations au rabais : les proprietaires des terrains en colère

Paul Emond
Paul Emond
Journaliste indépendant pour coursdesmetaux.fr
Sous les serres maraîchères du Haut-Rhin, des centaines d'hectares cachent une réalité géologique et juridique bien plus profonde : des kilomètres cubes de vide, de sel dissous et d’indemnités contestées. En surface, les tensions remontent lentement... comme la colère.

Sur les hauteurs d’Ungersheim ou de Pulversheim, des serres maraîchères profitent des sols plats du bassin potassique. En dessous, à plusieurs centaines de mètres de profondeur, les couches de sel ont été lessivées pendant des décennies. Aujourd’hui, les propriétaires de ces terres découvrent que leurs terrains reposent sur des cavités souterraines immenses, issues d’anciennes exploitations de potasse. Et quand certains veulent vendre, construire ou simplement comprendre ce qu’il se passe, ils se heurtent à un mur administratif, à des arrêtés en série, et à des compensations financières bien en dessous des préjudices subis.

Des cavités invisibles sous les cultures

Le bassin potassique alsacien est l’un des plus anciens d’Europe. L’exploitation remonte aux années 1904-1906, avec plus de vingt sites en activité jusqu’aux années 2000. Les gisements, situés entre 400 et 1100 mètres de profondeur, sont constitués de deux couches relativement fines mais très concentrées : 2 mètres pour 40% de chlorure de potassium, et 5 mètres pour 30% de chlorure, souvent associés à 60% de chlorure de sodium.

Ces chiffres bruts masquent une réalité bien plus vaste : les procédés d’exploitation, principalement par dissolution, ont créé d’immenses cavités, certaines atteignant plus d’un million de mètres cubes. Des vides invisibles, mais bien présents sous les pieds des exploitants agricoles.

Arrêtés en cascade : l’imbroglio administratif

C’est en voulant faire construire un bâtiment agricole que Bernard R., exploitant à Feldkirch, a découvert le pot aux roses : plusieurs arrêtés préfectoraux classaient son terrain comme « zone à risque de mouvement différé du sol ». Impossible d’obtenir un permis. Pire encore, le terrain est qualifié de « terrain à usage restreint » dans les archives du BRGM.

« Je savais qu’il y avait eu des mines par ici, mais de là à m’interdire de monter une simple structure démontable… Et qu’on me propose 8 300 euros de compensation pour bloquer 5 hectares, c’est une gifle. »

Le cas de Bernard n’est pas isolé. Dans certains cantons, les arrêtés se sont multipliés : mise en demeure des exploitants historiques, consignations de sommes liées à des obligations de réhabilitation, interdictions de forages, évacuations exigées… La machine administrative s’est emballée.

Chronologie des principales mesures dans le Haut-Rhin

Date Décision Conséquence
29 mai 2009 Mise en demeure Suspension d’activités minières
12 juin 2009 Nouvelle mise en demeure Préparation à la consignation financière
23 juin 2009 Consignation de sommes Sommes destinées à la dépollution
29 juin 2009 Arrêté préfectoral Demande d’évacuation de déchets industriels

Des indemnisations à géométrie variable

Pour compenser la perte de valeur des terres ou l’impossibilité de leur exploitation, certains recours existent. Mais dans les faits, les montants versés font sourire jaune. Des dizaines de dossiers ont été instruits par les Directions régionales de l’environnement (DREAL), et peu dépassent les 10 000 euros par terrain, même en cas d’interdiction d’usage permanent.

« Une de mes parcelles a été classée en zone instable. Je ne peux ni vendre, ni louer, ni construire plus qu’une cabane à outils… Et on me dit que la mine est trop profonde pour justifier une indemnité complète », dénonce Joëlle H., propriétaire à Wittelsheim.

Les experts indépendants sollicités par certains propriétaires estiment la décote foncière à 40 voire 60% dans les cas extrêmes. Mais sans reconnaissance formelle de ces dommages comme « accident minier », aucune réparation intégrale n’est juridiquement obligatoire.

Stocamine ravive la méfiance

À Wittelsheim, à 500 mètres sous terre, repose Stocamine : un site de stockage temporaire de déchets toxiques… devenu définitif. En juin 2025, la justice a entériné le confinement total de 42 000 tonnes de déchets, parmi lesquels mercure, arsenic ou cyanure, enfermés dans une ancienne galerie de sel. L’annonce a ravivé les inquiétudes des riverains.

Certains craignent des fuites ou des affaissements. Si les autorités assurent que la stabilité est maîtrisée, des dossiers confidentiels, selon nos sources, mentionnent des « incertitudes géomécaniques persistantes à l’horizon 2035 ».

Revendications des propriétaires face à l’État et aux exploitants

De plus en plus de collectifs se forment pour réclamer :

  • La reconnaissance systématique des terrains affectés comme zones à risque minier
  • Une réévaluation des indemnisations basée sur la décote réelle du foncier
  • Des garanties environnementales impliquant la transparence des données géotechniques
  • Une limitation stricte de tout nouveau stockage souterrain en zone sensible

À ce jour, les exploitants historiques comme les autorités préfectorales se renvoient la responsabilité. Ni l’exploitant minier, ni l’État ne semble prêt à envisager une révision des barèmes d’indemnisation.

Dans ce contexte, la colère monte. Silencieuse, comme les cavités souterraines. Mais tenace.

18 réflexions sur “Potasse en profondeur sous des serres, arrêtés en cascade et indemnisations au rabais : les proprietaires des terrains en colère”

  1. Cléophas Loustau

    C’est choquant de voir à quel point les propriétaires sont laissés pour compte. C’est facile pour les autorités de faire des arrêtés, mais eux, ils se retrouvent coincés sans compensation juste. Les terres sont à risque et l’indemnisation est ridiculement basse. Il faut que ça change!

  2. Léandre Dubois

    Cet article met bien en lumière la détresse des agriculteurs face à des problèmes qu’ils ne contrôlent pas. Les indemnisations semblent vraiment dérisoires par rapport aux pertes subies. Il est temps que les autorités prennent au sérieux la situation et agissent pour aider ces propriétaires.

  3. Géraldine Bleuet

    C’est vraiment préoccupant de constater à quel point les exploitants et les autorités se renvoient la balle. En tant que propriétaire de terres, je ressens cette tension. Comment peut-on garantir la sécurité et la transparence ? Que faire si ma parcelle devient considérée comme zone à risque ?

  4. Louise Marcenay

    Cet article met bien en lumière les défis auxquels sont confrontés les propriétaires terriens. L’auteur réussit à évoquer des réalités complexes avec clarté. Je partage entièrement son point de vue sur la nécessité de meilleures indemnisations et de la transparence des données. C’est un véritable appel à la justice pour ces exploitants.

  5. Lysandre Griset

    C’est vraiment inquiétant de voir à quel point les propriétaires se retrouvent coincés avec ces cavités invisibles qui détruisent la valeur de leurs terres. Les compensations sont dérisoires par rapport aux pertes encourues. Une réévaluation urgente s’impose pour restaurer un minimum de justice.

  6. Léonard Brousseau

    C’est incroyable toute cette histoire de mines et d’indemnités pour les agriculteurs. On dirait que l’administration s’en fiche complètement des galères que ça cause. Les compensations sont ridicule, on devrait les aider correctement !

  7. Léandre Dufort

    Cet article met en lumière une réalité inquiétante. Les propriétaires sont pris au piège par un système qui semble les ignorer. Les indemnisations sont dérisoires, et les risques liés à l’exploitation minière ne doivent pas être sous-estimés. Il est temps que l’État prenne ses responsabilités.

  8. Gildas Étincelle

    C’est inacceptable ! Comment peut-on laisser des propriétaires dans l’incertitude avec ces cavités sournoises sous leurs terres ? On parle de millions de mètres cubes de vide et des compensations dérisoires ! Les autorités doivent agir maintenant, avant que la colère n’explose comme un tremblement de terre.

  9. Clélie Verloque

    Les autorités doivent prendre conscience de l’angoisse que vivent les propriétaires. Ces cavités souterraines ne devraient pas ruiner des vies et des projets. Il est essentiel de revoir les indemnisations pour apporter une véritable justice à ceux touchés par ces problèmes miniers.

  10. Elowen Verneuil

    C’est vraiment préoccupant de voir comment les propriétaires sont victimes d’une situation qu’ils n’ont pas causée. Les indemnisations sont ridicules par rapport aux pertes qu’ils subissent. Il est temps que l’État prenne ses responsabilités et apporte des solutions justes et transparentes.

  11. Clotilde Verdier

    Cet article soulève des points importants, mais il est trop pessimiste. Les autorités doivent s’activer pour régler ces problèmes. Ce n’est pas juste de laisser les propriétaires dans l’incertitude et de minimiser leurs pertes. Une meilleure indemnisation serait un début!

  12. Liora Montalbano

    Cet article met vraiment en lumière les défis que rencontrent ces exploitants. C’est frustrant de voir comment l’absence de reconnaissance et des indemnisations insuffisantes peuvent affecter leur quotidien. Les autorités doivent agir et trouver des solutions équitables pour toutes les parties concernées.

  13. Hélène Verdier

    C’est hallucinant de voir comment ces problèmes souterrains impactent des exploitants comme Bernard. Je me demande si les indemnisations vont vraiment évoluer un jour, car les propriétaires méritent d’être correctement compensés. Qui sait, cela pourrait aussi nous toucher à l’avenir.

  14. Lysandre Corbeau

    Cet article met en lumière des enjeux cruciaux auxquels font face les propriétaires de terrains. L’auteur décrit très bien les conséquences des anciennes exploitations de potasse. Je suis d’accord avec l’importance de garantir une indemnisation juste et de traiter les préoccupations environnementales avec sérieux.

  15. Mélusine Carpentier

    C’est vraiment frustrant de voir des agriculteurs bloqués par des règles alors qu’ils essaient juste de vivre de leur terre. Les indemnisations semblent bien trop faibles pour compenser les pertes subies. Les autorités devraient vraiment faire un effort pour aider ces gens.

  16. Léonard Clémentine

    C’est vraiment décourageant de voir comment les exploitants se moquent des agriculteurs. Les indemnisations sont ridicules alors que les terres sont inutilisables. On dirait qu’on nous laisse dans l’ignorance, malgré tous ces soucis d’abîmes sous nos champs. On mérite mieux que ça!

  17. Léonie Dufresne

    Il est incroyable que les propriétaires soient laissés pour compte à cause de ces cavités souterraines. Les indemnisations sont dérisoires par rapport aux pertes subies. La transparence et des compensations justes sont essentielles pour rétablir la confiance avec les autorités.

  18. Marius Gloriot

    C’est absolument scandaleux ! Comment peut-on laisser des exploitants et l’État se renvoyer la balle tout en faisant subir cela aux agriculteurs ? Ces indemnisations ridicules ne font qu’ajouter l’insulte à la blessure. Les propriétaires méritent mieux que ça !

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