« La nappe est à risque » un gisement de phosphate sous un marais provoque un bras de fer d’experts

Paul Emond
Paul Emond
Journaliste indépendant pour coursdesmetaux.fr
Sous un marais apparemment paisible, un gisement de phosphate convoité redessine les lignes de fracture entre scientifiques, industriels et défenseurs de l’eau. Une bataille d’arguments s’engage tandis que les enjeux hydriques demeurent en toile de fond.

Un marais couvert de roseaux, traversé par quelques oiseaux d’eau, ne laisse rien transparaître de ce qui le menace en profondeur. Sous cette zone humide classée en partie en espace protégé, un gisement de phosphate attise les convoitises. Mais une série d’expertises indépendantes met en alerte sur un risque jugé critique : la contamination de la nappe phréatique. L’expression « la nappe est à risque », prononcée la semaine dernière par un hydrogéologue lors d’une réunion publique, a résonné comme un avertissement. Depuis, le débat s’est durci.

Un sous-sol riche, un dessus fragile

Le gisement, découvert à une trentaine de kilomètres au nord de Montaigu, dans une cuvette marécageuse bordée de zones agricoles, contiendrait selon les premières estimations plus d’un million de tonnes de phosphate. De quoi alimenter les engrais agricoles pour plusieurs décennies sur le marché européen. Mais les conditions de ce gisement posent problème : la couche minérale repose à faible profondeur, dessous une nappe aquifère vulnérable et interconnectée avec d’autres ressources hydriques régionales.

L’industriel Phostera, détenteur du permis d’exploration, assure que « l’exploitation pourrait se faire en respectant toutes les normes environnementales ». Un rapport commandé à un bureau privé va dans ce sens. Mais plusieurs chercheurs indépendants et associations locales restent sceptiques.

« La nappe est à risque » : témoignage d’un hydrogéologue

« On a ici une configuration de sol où les couches argileuses censées protéger la nappe sont discontinues. Le forage impactera forcément l’équilibre hydrogéochimique », explique Emmanuel Lortel, hydrogéologue indépendant sollicité par le collectif Aquavive. « La phrase que j’ai dite n’était pas un slogan : la nappe est réellement à risque si les forages ne sont pas extraordinairement encadrés. »

Selon ses observations, le marais joue un rôle tampon entre les terres agricoles voisines, très utilisées en intensif, et les eaux souterraines. Perturber ce réservoir naturel pourrait faciliter la migration de polluants agricoles vers les nappes profondes. Et au-delà du phosphate lui-même, c’est la méthode d’extraction — excavation partielle, drainage provisoire — qui inquiète le plus.

Pollutions chimiques et passifs inquiétants

Le phosphate n’est pas en soi une substance dangereuse. Ce sont ses composés secondaires, notamment les résidus liés à son traitement industriel, qui posent problème sur le long terme. Le cas du golfe de Gabès, en Tunisie, où 13 000 tonnes de boues phosphogysées sont rejetées chaque jour, est devenu emblématique. « On a vu disparaître 90 % de la faune halieutique en quelques années », rappelle Lortel. Si l’extraction au cœur du marais devait un jour être accompagnée de traitement sur site, ce genre de scénario pourrait se profiler, à moindre échelle, au niveau local.

Et surtout, certains phosphates contiennent des teneurs en métaux lourds — cadmium, arsenic, uranium — bien au-delà des seuils admissibles. Cela dépend de leur origine géologique. Une analyse récemment commandée par l’Université de Nantes sur 4 échantillons prélevés dans la zone a révélé des concentrations en cadmium variant de 62 à 85 mg par kg de P₂O₅. À titre de comparaison, la limite européenne pour les engrais phosphatés est fixée à 60 mg/kg.

Équilibre fragile des ressources en eau

La zone concernée relève du bassin Loire-Bretagne. D’après le dernier rapport de l’Agence de l’Eau, 31% des nappes de ce bassin présentent déjà un risque de non-atteinte des objectifs environnementaux d’ici 2027. Pour la moitié d’entre elles, les pollutions diffuses aux nitrates et phosphates en sont la cause première.

Voici les masses d’eau les plus concernées dans la région :

Masse d’eau souterraine État 2023 Polluants principaux
Zone de Clisson Nord Risque élevé Nitrate / Phosphore
Marais de Grand-Lieu Risque modéré Phosphore / Pesticides
Couloir Montaigu-Les Herbiers Risque élevé Cadmium / Nitrate

Si le gisement venait à être exploité, ces zones recevraient potentiellement des apports accrus en polluants, par ruissellement ou infiltration, surtout en cas de sécheresse suivie d’épisodes orageux.

Le dilemme : souveraineté ou sécurité hydrique ?

Avec une demande mondiale en phosphate appelée à grimper de 40 % d’ici 2040 selon la FAO, les arguments de souveraineté minérale prennent du poids. La Chine et le Maroc dominent déjà la production mondiale. Une extraction européenne permettrait de réduire la dépendance importatrice sur un intrant clé de l’agriculture.

Philippe Bellorge, ingénieur agronome et ancien conseiller à la Direction générale de l’environnement, tempère cette vision :

« Les engrais phosphatés sont déjà en surexploitation dans de nombreuses zones agricoles en France. Ce n’est pas une rupture d’approvisionnement qui menace, mais une mauvaise gestion des flux. »

Il propose de coupler une éventuelle autorisation minière à des quotas d’épandage par bassin versant, pour éviter une montée diffuse des phosphores dans les eaux.

Vers une commission indépendante ?

Face à la montée des tensions, les maires de cinq communes riveraines ont réclamé la mise en place d’une commission d’experts indépendants, incluant l’INERIS et le BRGM. Le préfet n’a pas encore répondu. Dans le même temps, une requête judiciaire pour bloquer temporairement les forages exploratoires a été déposée par les associations locales, avec un premier examen prévu début octobre.

Le bras de fer entre science, industrie et environnement ne fait que commencer dans ce coin de marais, dont la quiétude apparente masque mal les bouleversements à venir.

22 réflexions sur “« La nappe est à risque » un gisement de phosphate sous un marais provoque un bras de fer d’experts”

  1. Léandre Bénard

    Je comprends les enjeux économiques, mais risquer la nappe phréatique pour un peu de phosphate semble irresponsable. La santé des écosystèmes doit primer. Poussons pour des solutions durables qui préservent nos ressources en eau au lieu de les mettre en danger !

  2. L’exploitation de ce gisement soulève d’importantes questions sur notre réservoir d’eau. Même si le phosphate est essentiel, il ne faut pas négliger les risques environnementaux. Une bonne gestion est primordiale pour préserver nos ressources, mais le dilemme entre besoin minier et sécurité hydrique est délicat.

  3. Gaspard Lorrain

    Ce débat sur l’extraction de phosphate révèle des enjeux cruciaux pour notre environnement. La protection de la nappe phréatique doit être prioritaire. Que faire alors pour équilibrer les besoins agricoles et la préservation de nos ressources en eau ?

  4. Léandre Verdat

    L’article de Léandre Verdat est remarquable. Il met en lumière des enjeux environnementaux cruciaux tout en étant clair et accessible. J’approuve son analyse sur les risques liés à l’exploitation du gisement de phosphate. La préservation des ressources en eau est essentielle, et ses préoccupations sont totalement justifiées.

  5. Lysandre Chardon

    Je trouve que la protection de nos nappes phréatiques doit primer sur l’exploitation du phosphate. On parle de pollution, et notre eau est précieuse. Cherchons des alternatives pour éviter de ruiner notre environnement, c’est important pour les générations futures.

  6. Mélina Jourdain

    Ce marais a l’air beau mais c’est inquiétant pour l’eau. Si les chercheurs disent que c’est à risque, je pense qu’il faut vraiment faire attention avant d’exploiter le phosphate. Protéger nos ressources en eau, c’est super important!

  7. Léandre Bellon

    Cet article soulève des questions importantes sur l’exploitation du phosphate. Protéger notre eau est essentiel. On ne peut pas sacrifier l’environnement pour des profits à court terme. Il faut trouver un équilibre entre besoins agricoles et préservation des ressources naturelles.

  8. C’est hallucinant de penser qu’on pourrait mettre en péril une nappe phréatique pour quelques tonnes de phosphate ! Le marais semble très fragile et les dangers sont bien réels. On ne peut pas sacrifier notre environnement sur l’autel de la production agricole !

  9. L’exploitation de ce gisement de phosphate représente un véritable danger pour nos ressources en eau. Il est crucial qu’un débat authentique s’installe sur la préservation de notre environnement avant de céder aux promesses d’une production minière accroissante. La santé de la nappe phréatique doit primer sur les intérêts économiques.

  10. L’exploitation de ce gisement de phosphate pourrait causer des dégâts irréversibles au marais et aux nappes phréatiques. La protection de l’environnement doit primer sur les intérêts économiques. Il est important d’écouter les experts et d’agir avec prudence avant de prendre toute décision.

  11. Alaric Desmarais

    C’est inquiétant de voir que la recherche de phosphate peut mettre en péril notre nappe phréatique. La santé de nos écosystèmes devrait primer sur des promesses d’exploitation. Il est crucial de préserver cette zone humide au lieu de courir après des bénéfices à court terme.

  12. Il est crucial de peser les avantages de l’exploitation de ce phosphate contre les risques sur les ressources en eau. Une exploitation mal encadrée pourrait causer des dommages environnementaux irréversibles. Il est impératif d’écouter les experts et de protéger notre environnement.

  13. Mélian Dauré

    C’est alarmant de voir à quel point l’exploitation de ce gisement pourrait nuire à notre ressource en eau. La santé de nos nappes phréatiques ne devrait pas être mise en jeu pour des intérêts économiques. Cette situation mérite une attention urgente et des débats sérieux pour protéger l’environnement.

  14. Cet article de Aurore Pichon met en lumière les enjeux cruciaux de l’exploitation du phosphate. J’apprécie sa manière d’expliquer les risques environnementaux tout en confrontant les enjeux économiques, un équilibre nécessaire dans un débat aussi sensible. Les mises en garde d’experts sont d’une grande importance pour préserver notre environnement.

  15. Léandre Goudron

    C’est fou de voir à quel point les enjeux de l’exploitation de ce gisement de phosphate peuvent avoir un impact sur notre sécurité hydrique. On doit vraiment réfléchir aux conséquences avant de se précipiter sur des ressources qui pourraient nuire à notre environnement.

  16. Thalía Brossard

    C’est vraiment inquietant cette histoire de gisement de phosphate. Si ça risque de polluer notre eau, c’est pas du tout un bon plan. On devrait proteger la nature avant tout, pas l’inverse. J’espère que les experts vont vraiment bien surveiller ça !

  17. Cet article met en lumière un sujet crucial. Il est alarmant de voir les risques pour notre eau potable à cause de l’exploitation minière. La protection de notre environnement doit être prioritaire. Nous ne pouvons pas sacrifier notre santé pour des intérêts économiques à court terme.

  18. Cléophée Verdant

    C’est un scandale de vouloir exploiter ce gisement ! La protection de notre eau doit primer sur des profits à court terme. Quel héritage allons-nous laisser aux générations futures si les nappes phréatiques sont polluées ? Réveillons-nous avant qu’il ne soit trop tard!

  19. Théodore Laverdure

    Il est crucial de trouver un équilibre entre l’exploitation des ressources et la protection de notre environnement. L’urgence de la situation mérite une approche rigoureuse et une vigilance constante pour préserver notre nappe phréatique. Nos choix d’aujourd’hui détermineront l’avenir de nos terres.

  20. Sérénité Dampierre

    La situation du marais est vraiment préoccupante. On souhaite tous un équilibre entre exploitation minière et protection de l’environnement. Évaluer correctement les risques pour la nappe phréatique est essentiel. Les experts doivent être écoutés avant de prendre des décisions qui impactent nos ressources en eau.

  21. Thibaut Ménard

    C’est inquiétant de voir la pression pour exploiter ce gisement au détriment de notre environnement. Oui, la demande de phosphate augmente, mais ce n’est pas une raison pour risquer notre eau potable. Une approche durable doit prendre le pas sur l’exploitation à tout prix.

  22. Célestin Berthier

    L’exploitation de ce gisement présente des risques sérieux pour notre eau. La préservation de l’environnement doit être prioritaire. On ne peut pas sacrifier des ressources vitales pour des profits à court terme. Il est essentiel d’écouter les experts et de respecter la nature avant de prendre des décisions.

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