« La mer cache des coffres » des nodules polymétalliques repérés au large, les pêcheurs parlent de ligne rouge

Paul Emond
Paul Emond
Journaliste indépendant pour coursdesmetaux.fr
Au large des côtes, une découverte attise les convoitises et les craintes à la fois. Des formations métalliques tapies dans les grands fonds font émerger une controverse inattendue entre écologie, économie et traditions maritimes.

La mer, dit-on, dissimule bien des secrets. Mais certains, une fois révélés, provoquent des remous jusqu’à la surface. À plusieurs centaines de kilomètres des zones de pêche traditionnelles, dans les profondeurs de l’océan Pacifique, des chercheurs ont repéré d’étranges concrétions métalliques, appelées nodules polymétalliques. Leur valeur stratégique est immense. Mais ce gisement sous-marin réveille, dans le monde de la pêche, des lignes de fracture soudainement très visibles.

La découverte d’un potentiel minier sous-marin

En juillet dernier, une mission internationale de prospection océanographique a confirmé la présence massive de nodules polymétalliques dans la zone extrême-orientale de la zone économique exclusive française. Ces nodules – sphériques, noirs, grossièrement de la taille d’une boule de pétanque – jonchent à perte de vue les plaines abyssales, entre 3 500 et 6 000 mètres de profondeur.

Composés d’éléments stratégiques, leur intérêt ne fait aucun doute :

  • 30 % de manganèse
  • 1,4 % de nickel
  • 1,14 % de cuivre
  • 0,2 % de cobalt

Autant de métaux prisés pour les batteries, les véhicules électriques ou les éoliennes offshore. À l’heure de la transition énergétique et de la raréfaction des gisements terrestres, ces concrétions forment, selon les industriels, un « trésor oublié » de l’ère géologique, accessible seulement aujourd’hui.

Des milliards de tonnes dans l’attente

Les chiffres donnent le vertige : entre 21 et 34 milliards de tonnes de nodules joncheraient les abysses de la zone Clarion-Clipperton, une gigantesque étendue de 9 millions de kilomètres carrés entre Hawaï et le Mexique. Selon les estimations publiées dans plusieurs rapports, cette zone contiendrait jusqu’à :

Élément Quantité estimée
Nickel 340 millions de tonnes
Cuivre 275 millions de tonnes
Cobalt 44 millions de tonnes

Mais cette manne attire autant d’espoirs qu’elle génère de conflits souterrains. Car sous les eaux en apparence calmes, un bras de fer s’organise déjà.

Pêcheurs en première ligne

À Lorient, à Boulogne-sur-Mer ou à Saint-Jean-de-Luz, l’inquiétude monte depuis des mois. Il ne s’agit pas seulement de préserver leur zone de pêche, mais leur mode de vie. Pour beaucoup, toute forme d’extraction industrielle en mer profonde serait un point de non-retour.

« Ces coffres dans la mer, si on les ouvre, c’est la boîte de Pandore. On a déjà trop abîmé la surface, il ne faut pas toucher au fond. Là, on franchit une ligne rouge », m’a confié Alain Derrien, patron-pêcheur à l’île d’Yeu depuis trente ans. Il poursuit : « Que va-t-on laisser aux générations d’après ? Un désert sous-marin et des zones de reproduction mortes ? »

Les protestations concernent moins le geste technique – qui, même à des milliers de mètres, reste indirect pour eux – que les conséquences sur les écosystèmes et les équilibres océaniques. Beaucoup dénoncent le risque de panaches de sédiments gigantesques pouvant dériver sur de vastes zones, perturbant la chaîne trophique des océans, voire les frayères de certaines espèces migratoires commerciales comme le thon ou l’espadon.

Un impact irréversible ?

Des études scientifiques récentes alertent sur le rôle écologique de ces nodules : ils servent de socle à des millions d’espèces benthiques – crustacés, éponges, vers, étoiles de mer –, dont 90 % seraient encore inconnues de la science. La moindre exploitation broierait ces habitats millénaires, impossibles à régénérer à l’échelle humaine.

Un cadre juridique sous tensions

Alors que l’Autorité Internationale des Fonds Marins (AIFM), basée à Kingston (Jamaïque), a pour mission de réguler ces activités, la donne a brusquement changé. En avril 2025, l’ex-président américain Donald Trump a relancé un décret controversé, autorisant ses entreprises à lancer des opérations de prospection, y compris dans les zones internationales.

Face à cela, 18 pays, dont la France, ont reçu des permis d’exploration. Si ces autorisations se limitent encore à la collecte de données, les géants miniers comme GSR ou The Metals Company ont déjà déployé leurs navires pilotes, capables de draguer jusqu’à 300 tonnes par jour.

Les projets de navires minéraliers atteignent des tailles impressionnantes – jusqu’à 60 000 tonnes – avec des circuits logistiques pensés pour un acheminement via le canal de Panama, prouvant que cette ruée n’est plus théorique.

Une bataille silencieuse, pour le moment

Pour l’instant, aucune extraction commerciale n’a encore été lancée. Mais les tensions sont là. Le gouvernement français, via l’IFREMER, mène ses propres recherches. Officiellement, il s’agit de “mieux comprendre les écosystèmes”, mais des ingénieurs du CEA travaillent déjà sur des procédés métallurgiques spécifiques à ces minerais extraits des grands fonds. Des start-up hexagonales ont même vu le jour autour du traitement de ces nodules.

Face aux critiques, certains industriels invoquent une réalité bien plus crue : les besoins en métal pour les batteries nécessaires à la neutralité carbone sont exponentiels. L’Agence internationale de l’énergie estime que, sans nouvelles sources, la production de cuivre et de lithium pourrait être inférieure de 40 % à la demande mondiale d’ici dix ans.

Cette impasse alimente un choix difficile pour les États : ne rien exploiter, au prix de dépendances stratégiques, ou ouvrir la voie à une industrie risquée, avec des conséquences potentiellement irréversibles sur la biodiversité océane. Entre science, économie et éthique, les abysses sont devenues le théâtre d’un dilemme planétaire. Une ligne rouge, en effet, est bien en train de se dessiner.

21 réflexions sur “« La mer cache des coffres » des nodules polymétalliques repérés au large, les pêcheurs parlent de ligne rouge”

  1. Alban Truchot

    C’est un vrai dilemme ça ! D’un côté, on a besoin de ces métaux pour notre avenir, mais de l’autre, on risque de détruire des écosystèmes uniques. La mer est déjà assez maltraitée, je crains que ce soit une erreur irréversible de plonger là-dedans.

  2. Eliott Verlaine

    Cet article soulève des questions cruciales sur la protection des écosystèmes marins. Exploiter ces ressources pourrait causer des dommages irréversibles. Il est essentiel de trouver un équilibre entre nos besoins en métaux et la préservation de notre planète. Nous ne pouvons pas sacrifier la biodiversité pour des gains économiques à court terme.

  3. Eloïse Ardent

    Cet article soulève des enjeux cruciaux sur la biodiversité marine. Que va-t-on laisser derrière nous si on exploite ces ressources ? Je me demande, en tant qu’amoureuse de la mer, comment les habitants des côtes vivent cette situation. Pourquoi ne pas chercher des alternatives moins destructrices ?

  4. Thalion Verdun

    Cet article met en lumière une problématique essentielle. L’auteur réussit à bien transmettre l’urgence de la situation face à l’exploitation des fonds marins. Je partage totalement son avis sur l’importance de préserver nos écosystèmes tout en naviguant entre les besoins économiques et environnementaux.

  5. Céleste Evorée

    Je trouve ça un peu exagéré de s’inquiéter autant. Les métaux du fond, c’est aussi une chance pour l’écologie. On a besoin de trouver un équilibre entre notre consommation et la protection de la mer. Peut-être qu’un bon encadrement pourrait éviter les erreurs du passé.

  6. Léonard Perle

    C’est fou comme ces nodules peuvent nous apporter des métaux précieux, mais tout ça peut détruire les fonds marins. Si on continue à creuser, ça risque de causer un vrai désastre pour les poissons et la biodiversité. Faut vraiment réfléchir à tout ça avant d’agir.

  7. Elise Grandpré

    Cet article met en lumière un vrai dilemme. Extraire ces nodules pourrait apporter des métaux précieux, mais à quel prix pour nos océans ? La biodiversité est trop précieuse pour être sacrifiée. Il est urgent de trouver un équilibre entre nos besoins et la protection de la planète.

  8. Lysandre Aventurine

    C’est rampant d’exploiter nos océans pour des minerais, alors que l’on sait que cela peut détruire la vie. Que vont devenir nos mers? Un désert sous-marin ? Nous devons absolument préserver ces écosystèmes fragiles pour les générations futures ! Arrêtons cette folie avant qu’il ne soit trop tard !

  9. Alaric Virevolte

    L’exploitation des nodules polymétalliques représente une menace réelle pour nos écosystèmes marins. Si nous priorisons les besoins industriels au détriment de la biodiversité, nous risquons de sacrifier notre environnement pour des profits à court terme. Protéger nos océans doit être la priorité.

  10. Lior Teddington

    Il est essentiel de réfléchir aux conséquences de l’exploitation des fonds marins. Les métaux sont nécessaires pour la transition énergétique, mais à quel prix? La préservation des écosystèmes sous-marins devrait être une priorité. Ne pas réitérer les erreurs du passé semble crucial pour notre avenir.

  11. Balthazar Lefèvre

    Cet article soulève des enjeux cruciaux. D’un côté, l’extraction pourrait répondre aux besoins croissants en métaux. De l’autre, on risque de détruire des écosystèmes entiers. Équilibrer développement et préservation, c’est un vrai casse-tête pour notre avenir.

  12. Thibaud Kerviel

    Les découvertes des nodules polymétalliques soulèvent des questions cruciales. Il est essentiel de peser les bénéfices économiques face à la préservation des écosystèmes marins. La quête de ressources ne doit pas se faire au détriment de notre biodiversité. Agissons prudemment!

  13. Olympe Dufresne

    Ces découvertes sur les nodules polymétalliques sont fascinantes, mais le risque pour nos océans est réel. On ne peut pas se permettre de détruire la biodiversité pour des matières premières. Comment allons-nous trouver un équilibre entre développement industriel et préservation des écosystèmes marins ?

  14. Lysandre Bertin

    Cet article de Lysandre Bertin est fascinant et soulève des questions cruciales. Je suis tout à fait d’accord avec lui : l’exploitation des fonds marins pourrait avoir des conséquences irréversibles sur nos écosystèmes. Il est essentiel de préserver les merveilles de nos océans pour les générations futures.

  15. Lysandre Merloz

    Franchement, je ne comprends pas pourquoi on ne peut pas juste laisser la mer tranquille. Ces nodules peuvent jouer un rôle central dans l’écosystème. Exploiter ça, c’est risquer de tout détruire pour un profit à court terme. Ça ne vaut pas le coup.

  16. C’est vraiment inquiétant tout ça. Exploiter les fonds marins, ça pourrait faire des dégâts énormes sur les écosystèmes. J’suis pas sûr que ça vaille le coup pour quelques métaux. Faut penser aux générations futures !

  17. Léonard Barbot

    C’est inquiétant de voir la mer menacée pour des métaux. Ces nodules sont des habitats essentiels pour des milliers d’espèces. On ne peut pas sacrifier l’océan pour des besoins industriels, surtout avec des risques irréversibles. La biodiversité doit être protégée avant tout.

  18. Alaric Varnier

    C’est un véritable cauchemar écologique en perspective ! Ces nodules polymétalliques, ce trésor sous-marin, pourraient détruire des écosystèmes qui existent depuis des millions d’années ! Entre la course aux métaux et la préservation des océans, le choix est évident. L’avenir de notre planète est en jeu !

  19. Lysandre Montblanc

    L’exploitation des nodules polymétalliques dans les grands fonds marins est une question complexe. Nous devons peser les bénéfices économiques contre la nécessité de protéger des écosystèmes encore peu compris. La durabilité de nos océans doit primer sur la course à la ressource.

  20. L’exploitation des nodules polymétalliques pourrait causer des dégâts irréparables sur nos océans. La santé des écosystèmes marins est déjà fragile, et il est crucial de penser aux générations futures avant de lancer cette industrie. Préférons-nous un avenir durable ou un désastre écologique ?

  21. C’est bien beau de parler d’extraction sous-marine, mais qu’en est-il des écosystèmes ? Les pêcheurs ont raison d’avoir peur. On va détruire des habitats pour quelques métaux. À ce rythme, on va laisser une mer morte aux générations futures. À quand une vraie réflexion sur la biodiversité ?

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